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Hauts cris [miniature]

les jeudi 5, vendredi 6 octobre 2006 à 20h30 et samedi 7 octobre 2006
à 19h à Montévidéo

En partenariat avec Montévidéo, dans le cadre de actOral.5, Festival d’écritures contemporaines.

production Association J’y pense souvent […]
coproduction : Les Laboratoires d’Aubervilliers [création en octobre 2005] ; La muse en circuit - Centre de création musicale en Île-de-France ; le Centre national de danse contemporaine d’Angers ; le Centre Chorégraphique National de Tours ; ARCADI.
avec le soutien de la Direction régionale des Affaires Culturelles d’Île-de-France - Ministère de la Culture et de la Communication ; DICREAM ; Centre National de la Cinématographie ; Les Spectacles vivants-Centre Pompidou.

chorégraphie et interprétation Vincent Dupont son Thierry Balasse lumière Yves Godin assistante Myriam Lebreton dispositif scénique Vincent Dupont décor Boris Jean ; ébéniste Pierre Mathiaut costumes François Blaizot travail voix Valérie Joly texte Agrippa d’Aubigné
 

Hauts Cris [miniature]
, inspiré d’un texte de Théodore Agrippa d’Aubigné, travaille différentes échelles de représentation de l’espace et du son pour révéler un état intérieur lié au cri. Un état intérieur qui n’est pas la peur mais une protestation vehémente.
 

Il est seul dans un espace trop petit pour lui et chacun de ses mouvements résonne de façon extraordinaire, comme si chaque déplacement, aussi petit soit-il, était lesté d’une tension énorme. Autour de lui, l’espace convivial d’une salle à manger semble écrasé par sa présence et prêt à voler en éclats.

Vincent Dupont


 

C’est vers Théodore Agrippa d’Aubigné, ardent calviniste du XVIe siècle, que Vincent Dupont s’est tourné pour cette nouvelle création.
Ni illustratif ni prétexte à la danse, c’est dans un rapport dynamique qu’il a choisi une fois encore de travailler la matière littéraire.
Les Tragiques, sorte de drame sacré dont la rédaction commença en 1577, se composent de sept livrets ; mais c’est principalement Vengeances et Jugements qui ont accompagné la conception de Hauts Cris.
L’écriture à la fois cruelle et poétique d’Agrippa d’Aubigné vient faire écho à la tension polyphonique de la pièce [corps, voix, bruitages].
Les énergies des deux créateurs se répondent à travers le temps : l’irrépressible colère de l’homme du XXIe siècle et en contrepoint, les alexandrins d’Agrippa d’Aubigné chargés d’horreur, une révolte politique transcendée.
 

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Au premier abord, le travail chorégraphique de Vincent Dupont apparaît essentiellement visuel. On dirait plus précisément : pictural. […]
[…] Infimes modifications des équilibres. Lent morphing gestuel. De fait, les spectacles de Dupont « font image ». Une tendance pictorialiste volontairement appuyée par un travail sensible et déterminant sur le décor, la lumière et le son.
Les scénographies des spectacles de Dupont, élaborées et réalisées avec soin, en étroite collaboration avec l’artiste Boris Jean, composent ainsi de véritables installations montées sur la scène, disposant symboliquement un cadre redoublant celui du plateau de théâtre. Un cadre qui focalise le regard, et semble projeter l’action sur une surface plane. Les proportions de cette ouverture unique sur la scène circonscrivent d’ailleurs un regard de type panoramique, suivant un modèle autant cinématographique [type écran 16/9e ou cinémascope] que pictural. Une exposition bien déterminée qui contraint le spectacle dans une unité de temps, de lieu et d’action ; mais contraint aussi bien les corps des interprètes, les expose, les conditionne en tant que motifs. Dans Hauts Cris, le personnage éprouve d’ailleurs physiquement ce cadre, tentant manifestement d’en sortir, de jouer les passe-murailles. En vain. Point de fuite possible. Le travail tout aussi remarquable de la lumière, extrêmement précis quoique très simple, atteste d’une même recherche vers une iconographie de type classique. Clair-obscur pour Jachères. Sfumato pour Hauts Cris. À la fois puissante et diffuse, la lumière surexpose les scènes tout en les aplanissant, les déréalise. À tel point qu’un spectateur, incrédule mais fasciné par l’efficacité illusionniste de ces effets minimaux, put se faire en lui-même cette réflexion, pendant les dix premières minutes de Jachères : « C’est incroyable ce qu’on fait aujourd’hui avec la vidéo ! ». 3D Reform. Hologrammes. Le son, enfin, n’est pas pour rien dans ce trouble perceptif des spectacles de Dupont. Puissant, amplifié électroniquement, modifié en direct par le musicien Thierry Balasse [autre fertile collaboration] et diffusé de manière pénétrante, il surexpose acoustiquement l’ensemble, achevant de transformer cette réalité physique et matérielle de la scène en bouleversantes apparitions spectrales.
 

Ce caractère éminemment plastique des pièces de Vincent Dupont n’est pas d’ailleurs sans références multiples, que l’on peut puiser dans une histoire récente des arts visuels.
Si dans Jachères la luminosité, les tonalités chromatiques et le choix même du sujet rappellent les toiles d’Edward Hopper, les photographies « chaudes » de Nan Goldin, voire une ambiance côte-ouest américaine à la David Lynch ; c’est plus vers un climat froid, vers les intérieurs neutres et insaisissables d’un Balthus ou d’un Vilhelm Hammershoi que penche Hauts Cris. Subtilement, par ailleurs, Dupont associe à l’intérieur de son cadre plusieurs champs picturaux, jouant notamment sur la superposition de motifs figuratifs et abstraits. Dans Jachères, c’est un pan de lumière vive sur une paroi colorée qui vient contraster avec la figuration globalement très réaliste de la scène. Dans Hauts cris, c’est un écran de lumière diaphane, pratiqué au fond du décor, qui opère comme un deuxième niveau de projection. Présence surplombante du monochrome dans la scène de genre. […]

Cris et chuchotements, extraits.
un texte de Guillaume Désanges à propos de Vincent Dupont,
in Le Journal des Laboratoires n° 5 – janvier-juin 06