samedi 6 et dimanche 7 octobre 2007 à 17h à la Cartonnerie, Friche la Belle de Mai
En partenariat avec actOral.6, Festival international des arts et des écritures contemporaines.
Invité en 2006 par Marseille Objectif Danse et Montévidéo à présenter Domaine de la jalousie
avec Guillaume Allardi et Montaine Chevalier dans le cadre de actOral.5, Yves-Noël Genod revient
avec une nouvelle création.
…j’écris des poèmes, des lettres, des adresses et – voyez-vous – je rêve à chaque fois de faire un spectacle sans ironie et sans la détresse de la dérision, mais – le voyez-vous ? – l’absurdité du monde me rattrape ; …
Distribution en cours
« Un spectacle se fait en collaboration. Il va de soi que les miens plus que les autres. Je demande souvent (toujours) aux acteurs de ne faire que ce qu’il veulent. Je demande ça parce que je ne leur demande ni leur talent ni leur virtuosité, je leur demande beaucoup plus : je leur demande leur liberté. Ce vol est l’équivalent d’un amour. Les acteurs et les actrices sont comme mes amants. (…) »
"Monsieur Villovitch, c’est moi."
"Ce spectacle, le dix-neuvième, est le plus beau que j’aie jamais fait. Que ceux qui m’aiment prennent le train ! C’est en week-end... Je ne crois pas que je bénéficierai encore de telles conditions : un plateau fabuleux, comparable à ceux des plus grandes scènes européennes, dont on utilise la lumière naturelle en fond de scène pour construire un immense contre-jour. Le soleil dédaigné. C’est mon avant-dernier spectacle. Il n’y a plus là ni théâtre ni danse. Ni vie ni mort. Ni absence ni présence. Le hors-champ est total, massif. On y parle de racisme. De la jouissance. Les acteurs y sont exceptionnellement heureux. Je me permets d’insister, il s’agit de Jonathan Capdevielle, Marlène Saldana, Thomas Scimeca, Benoît Thevenoz."
Yves-Noël Genod
"Ce que j’ai vu (à la Friche) était fort ; j’y ai repensé et j’en ai reparlé après ; ça sidère et ça fout un cafard monstre aussi (donc tu peux être content)." Nathalie Quintane
L’épaisseur du silence
« It isn’t very important if all we’re doing is dancing forever on the edge of the abyss. » Michael Moorcock.
Daniel Larrieu, me raconte Jonathan Capdevielle* à l’instant – parce qu’il sait que je suis friand des récits où j’inspire visiblement la passion – un peu comme Picasso disait : « Je n’ai pas d’amis, je n’ai que des amants ! » – Daniel Larrieu qui vient de me programmer à Avignon l’agrippe récemment et lui parle de moi : « Je l’aime autant que je le déteste ! » Suivent dix minutes d’explications et de drague mélangées comme Daniel en a le secret : il m’aime et il me déteste. Il m’aime parce qu’il m’aime (moi aussi, je l’aime) et il me déteste à cause de mon esprit de dérision, de mon ironie en particulier à l’égard de la danse qui se doit de révéler, pour Larrieu, « l’épaisseur du silence ». Dans le spectacle d’Avignon, La Descendance, Hélèna Villovitch me faisait dire : « Moi, ce n’est pas après avoir travaillé sept ans avec Claude Régy et quinze ans avec François Tanguy que je vais, maintenant, m’intéresser à l’épaisseur du silence ! » Elle me faisait ajouter : « Non, moi, ce qui m’intéresse, c’est de montrer mes fesses ! » Eh bien, c’est le moment de le dire plus calmement puisque ma femme me laisse parler : je m’intéresse aussi, comme Daniel le pressentait, à l’épaisseur du silence – j’allais dire : « l’écriture » du silence car je n’ai pas seulement travaillé avec Claude Régy, j’ai aussi lu passionnément Duras ! Marguerite Duras disait qu’elle gardait toutes mes lettres dans le premier tiroir de la commode, là, et qu’un jour prochain, elle en ferait un livre. Elle disait aussi d’autres choses et d’autres choses merveilleuses. Le quinze août, on répandait les cendres de ma cousine Hélène sur la mer. Oui, je m’intéresse à l’épaisseur du silence parce que je suis comme tout le monde : moi aussi je suis paumé, alors : j’écris. J’ai une femme, j’aime ma femme et j’écris des poèmes, des lettres, des adresses et – voyez-vous – je rêve à chaque fois de faire un spectacle sans ironie et sans la détresse de la dérision, mais – le voyez-vous ? – l’absurdité du monde me rattrape ; je veux dire : pas les animaux, pas la nature, pas la beauté, mais la manière dont les choses se sont imbriquées dans la société des hommes. François Tanguy, l’autre fautif parmi mes géniteurs, disait souvent : « Pourquoi l’humanité en est-elle encore là ? » Oui. Ce matin, voyez-vous, je reviens de vacances (sur une île de l’Atlantique) et je retrouve à Paris les titres de journaux : Y A-T-IL UN PILOTE – MICHEL SARDOU VICTIME D’UN ESCROC – LE PÉDOPHILE SORTAIT JUSTE DE PRISON (« Libération », « Ici Paris », « Le Parisien ») « J’en ai assez vu ! », me dis-je. Et : « Soit je retourne illico à Ouessant, soit je rigole. » J’ai rigolé – parce que j’allais à mon cours de danse !
YNG, vendredi 17 août 2007.
* à moins que ce soit Thomas Scimeca, peut-être. Tous les deux beaux garçons, de toute façon.